Accueil >> Feuilleton >> Chapitre X :Où tout va à vau-l'eau
Alors que Kevlhard était ligoté sur une brochette géante, Mortimer, Domy et Lirufec restaient confinés dans les cales d'unnavire pirate. A peine sortis de l'île des Wabbits, nos héros devaient faire face à deux nouveaux dangers : des Kannibouls bien décidés à faire un méchoui de Iop, et des Pirates de Moon résolus à trouver un trésor imaginaire.
Ajoutez à cela le mal de mer qui foudroie une fois de plus notre boîte de conserve favorite et vous comprendrez pourquoi les adorateurs de Moon étaient fort pressés de se débarrasser de leur brochette nauséabonde qui ne cessait de vomir ses tripes.
En quittant l'île de Wabbit, Kevlhard avait perdu son accent bizarre, mais retrouvé ses nausées. Il en faisait profiter la petite flotte de canoës Kannibouls, qui se demandait comment un si petit corps pouvait contenir tant de substance à régurgiter.
— Toi arrêter cracher du manger, lui criait un Kanniboul tout en continuant de pagayer.
— Moi, blurp, pas pouvoir, lui répliqua le Iop entre deux vomissements.
— Moi mettre herbes dans lui pour arrêter cracher du manger, proposa un second Kanniboul.
— Pas bonne idée. Lui recracher herbes aussi, lui répondit celui qui semblait être le chef de la petite troupe. Nous ramer vite pour plus avoir lui dans bateau.
— Ah, non ! Erf... Faites pas ça, hurla Kevlhard. Ça tangue encore plus et je vais...
Il n'eut pas le temps de finir sa phrase. Une grosse touffe de thym ressortit de sa gorge en une bouillie verdâtre suivie de quelques rondelles de citron.
***
Nos trois autres compagnons passaient le temps comme ils le pouvaient, enfermés dans la cale du bateau des Pirates de Moon.
— On est vraiment obligé de jouer avec mon corps ? demanda Mortimer, un peu inquiet de voir des éléments de son anatomie voler entre les mains de l'Eniripsa et de l'Osamodas.
— Oh, ça va ! s'exclama le lutin. On n'a rien d'autre à faire que de jouer aux osselets, de toute façon, et c'est pas comme si on allait en perdre un.
— Et la troisième phalange de mon petit doigt, hein ! Qui c'est qui l'a paumée la dernière fois ? protesta le Sram.
— Oh ça va ! J'te rappelle que c'était la faute à Kevlhard et il est même pas là. Ça devrait aller, dit Domy pour essayer de le rassurer.
— Vous pensez qu'on va retrouver la boîte de conserve ? demanda Lirufec.
— Tout ce que je sais, c'est que je ne veux pas finir comme lui, dans un estomac de Kanniboul. J'espère que ces pirates sont plus rapides qu'eux sinon il est cuit... De toute façon, je l'aime pas trop, ce Iop, rétorqua Mortimer.
— Moi, ce qui m'inquiète, c'est plutôt ce qui nous attend après, répliqua l'Osamodas. Le capitaine Chouque est vraiment persuadé qu'on connaît l'emplacement d'un trésor. Si on ne lui en trouve pas un, c'est nous qui sommes cuits.
— En attendant, vous pourriez prendre soin de mes os ? s'écria Mortimer. C'est déjà pas super pratique d'avoir un petit doigt en bois, alors si vous pouviez éviter de me les briser, ce serait sympa.
Au moment où Domy s'apprêtait à relancer les osselets, le pirate Nakunbra ouvrit la porte en hurlant : « Debout les marmots ! Kannibouls en vue ! J'vais pas vous prendre par la main, alors on se remue ! »
Les trois compagnons le suivirent sur le pont, où tous les autres membres de l'équipage semblaient pris de frénésie. Le Chouque hurlait en arrosant ses seconds de postillons alcoolisés. Canon Dorf rechargeait ses munitions. Boomba préparait des canots pour récupérer le Iop. Les autres couraient en tous sens pour se préparer à la bataille navale.
— Vous, les gamins ! hurla Le Chouque. Vous allez venir avec moi dans le canot pour récupérer le Iop. Boomba, tu me les torpilles rapidement, ces nu-pieds de Kannibouls ! Pas de quartier !
— Pas de quartier ! renchérit l'oiseau perché sur l'épaule du capitaine.
Le branle-bas de combat était impressionnant et malgré l'impression d'agitation désordonnée, les hommes se mettaient bel et bien en place pour l'assaut. Un peu plus loin, la petite flotte de canoë Kannibouls paraissait elle aussi prête à faire face à l'assaut.
Le chef des Kannibouls sortit des drapeaux de couleur et commença à les agiter. Un des pirates se mit lui aussi à gesticuler dans tous les sens avec deux fanions.
— Qu'est-ce qu'ils font? demanda Domy à Nakunbra pendant qu'ils descendaient dans le canot.
— Chut! Ils dialoguent, murmura le Pirate. C'est un moment crucial et de très haute tension. Ils négocient pour savoir si on fait ça plutôt à la « Toucher-Couler » au tour par tour ou si on se fout dessus en vrac.
— Ça fait vraiment une différence ? s'enquit Mortimer.
— Ben, nous, on a toujours été nuls à « Toucher-Couler » car Le Chouque n'a jamais su se repérer.
Il finit toujours par dire des lettres et des chiffres au hasard. C'est de la bataille navale moderne, il paraît. On tire chacun son tour et on se fait des politesses.
— Et il dit quoi aux Kannibouls, votre collègue aux drapeaux ? demanda Lirufec.
— Oh, ben là, il leur dit... Oh ! Chouette chouette chouette ! On va faire ça à l'ancienne, en vrac quoi, conclut le pirate pendant que les flèches des Kannibouls commençaient à pleuvoir.
À peine installés dans le canot, nos trois compagnons commencèrent à souquer ferme et en rythme, esquivant à la fois les flèches et les postillons du Chouque qui se tenait à l'arrière de l'embarcation. Pendant ce temps, Canon Dorf tirait encore et encore d'énormes boulets en essayant de viser tant bien que mal le canoë où le Iop était retenu sur sa brochette.
Les tirs plus ou moins aléatoires des deux camps contribuaient à renforcer le tangage. Le Iop n'avait plus vraiment le coeur au ventre, mais plutôt au bord des lèvres. Bien que son estomac soit vide, il était décidé à se débarrasser de quelques-uns de ses organes, à commencer par ses tripes. Son teint était si livide qu'on aurait pu le prendre pour un fantôme errant à la recherche d'une statue de phénix. Il n'avait plus la force d'articuler et se contentait de gémir de temps en temps. D'un certain point de vue, son discours actuel était presque plus cohérent qu'à l'habitude...
***
Les deux camps alternaient les salves de tirs et d'insultes avec une régularité et un rythme effrénés. Le galion pirate torpillait ainsi les embarcations ennemies tout en essayant de ne pas transformer le Iop en charpie. Au bout d'un moment, Canon Dorf arriva à court de munitions, alors que le reste de la flotte poursuivait les salves d'artillerie. De rage, il se mit à casser les rames, les fourra dans son canon et tira en direction des Kannibouls, puis il commença à regarder d'un oeil concupiscent l'Eniripsa.
— Ah, non ! Je sais à quoi vous pensez, mais c'est non, lui dit Lirufec de façon péremptoire.
— Viens là, petit ! J'ai un travail à ta mesure, répliqua Canon Dorf d'une voix soudainement doucereuse.
— Non, non, non, répliqua le lutin tout en essayant de reculer dans le petit espace vital du canot.
Le Chouque mit fin à la discussion en empoignant l'Eniripsa et en l'enfournant dans le corps du canon. Et c'est ainsi que, malgré ses véhémentes protestations, Lirufec put tester les joies du vol avant d'amerrir à côté du canoë où se trouvait Kevlhard.
— Eurk, fit le nain après avoir recraché les quelques tasses provençales qu'il avait avalées. Mais t'as déposé des gerbes dans la flotte, le Iop !?
Le Kanniboul le plus proche tenta de lui donner un coup de pagaie pendant que l'autre Kanniboul de l'embarcation essayait d'échapper aux tirs du navire pirate.
Un second tir fit rouler le canoë mais le rata de peu. Cette fois-ci, le boulet était l'Osamodas.
— Alors Domy, on rigole moins de ma petite taille, hein ! lança Lirufec à sa camarade resurgissant de l'eau.
— Sombre ! Crétin !
Les deux compagnons n'eurent pas le temps de philosopher plus sur la bonne taille à avoir pour ne pas finir en boulet dans le ventre de Canon Dorf. Un troisième projectile spécial du nom de Mortimer arriva au beau milieu du canoë transportant le Iop. Cette fois-ci, le Pirate avait bien visé : touché et coulé ! Pendant que les Kannibouls venant de chavirer essayaient de nager vers les barques encore en état de flotter, Domy eut la présence d'esprit d'invoquer un bon gros Bouftou afin de s'en servir comme bouée de sauvetage. Lirufec commençait alors à détacher le Iop de sa brochette, lorsque le Sram cria de détresse.
— Et M... ! J'ai perdu des morceaux de mon tibia...
Et c'est ainsi que Mortimer perdu ses os dans l'eau.
Merci d'écrire dans un francais correct et d'éviter le bwork et le sms.
Le , ThSJ a écrit :
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